Chikungunya à La Réunion : la honte d'une nation


Publié le : 19/02/2006



Qu'est ce que le chikungunya ?

 

Le chikungunya est un virus transmis à l'homme par un moustique. A ce jour, on ne sait ni le prévenir par un vaccin ni le guérir par un médicament. La raison en est simple, c'est que le virus n'a, jusqu'à 2005, touché que les pays pauvres d'Afrique sub-saharienne, du sud de l'inde et de l'Asie du sud-est. Aucun laboratoire de recherche ne s'est donc intéressé à cette maladie pour essayer d'y apporter un remède ou une solution.

 

La maladie du chikungunya n'est pas bénigne ; ce n'est pas "une grippe avec une forte fièvre" comme l'avait malencontreusement déclaré un ministre en décembre dernier.
Le 24 septembre 2001, 13 jours après l’attaque contre les Twin Towers, l'OMS avait émis une alerte concernant les Agents biologiques susceptibles d’être utilisés à des fins terroristes. Parmi les virus, figurait en dix septième position celui du Chikungunya. Plus loin dans le temps au début des années 80, l'armée américaine s'était intéressée à ce virus pour en fabriquer une arme bactériologique. Le New-York Times dans son article du 24 septembre 1986 faisait état de la "disparition et de la destruction accidentelle" de virus contaminé dans les laboratoires du pentagone en 1981. Pourquoi cet intérêt des militaires pour ce virus ? Parce que les dégâts que le chikungunya pouvait causer aux troupes ennemies sont importants : fièvre, céphalées (maux de tête), nausée, vomissement, diarrhée, éruptions cutanées, petites hémorragies, et surtout myalgie (douleur musculaire) et arthralgie (douleur articulaire) qui sont caractéristiques du chikungunya. C'est d'ailleurs de la que vient le nom du virus, chikungunya, qui signifie en swahili "marcher courbé". On imagine alors aisément l'état opérationnel du soldat ennemi qui souffrirait de tout ou partie de ces maux.

 

Ce rêve que les stratèges du pentagone avaient imaginé à l'époque de la guerre froide, est aujourd'hui devenu le cauchemar des dizaines de milliers de réunionnais.

 

 

Comment en est-on arrivé là ?

 

A ce jour, 110.000 malades ont été officiellement recensés et 52 morts (des êtres humains et non des canards ou des cygnes retrouvés au bord d'un lac…) directement ou indirectement imputés au virus, pour une population d'à peine 750.000 habitants.

 

Comment en est-on arrivé à ce désastre sanitaire sur un territoire français et européen en 2006 ?

 

D'abord l'arrogance ; celle du petit monde médical, qui, se considérant comme faisant partie de l'élite mondial dans le domaine sanitaire, a regardé venir cette épidémie des pays sous-développés avec mépris et légèreté. Aucune précaution n'a été prise lors de la déclaration des premiers cas en février 2005 pour procéder à l'isolement réel (hospitalisation) ou virtuel (protection à domicile) des premiers porteurs de la maladie. "On a réglé le problème du paludisme, on règlera aussi celui-la".

 

Arrogance aussi de la population locale qui considérait le moustique comme un problème pour les touristes européens ; "nous on a l'habitude des moustiques, ce n'est pas la petite bête qui va dévorer la grosse". Erreur fatale des uns comme des autres …

 

Après l'arrogance, l'insouciance ; celle des scientifiques, qui ayant vu l'épidémie de dengue de 2004 s'arrêter avec l'hiver austral, ont spéculé de même en 2005, espérant une extinction naturelle de la population du moustique Aèdes Albopictus vecteur de la maladie.

 

Insouciance également de la population qui, faute d'information jusqu'à la fin de l'année dernière n'avait pas réellement pris conscience de la gravité de la situation, ne se protégeait peu voire pas du tout, concourrant ainsi à une propagation non intentionnelle mais bien réelle de la maladie dans toute l'île. A leur décharge, le constat effectué par la mission IGAS de décembre 2005 dans sa troisième partie sur "une communication malaisée". Malgré le travail d'information correctement effectué par la presse écrite, la communication officielle des autorités concernées ainsi que le flux médiatique radiophonique et télévisuel trop modéré sur cette épidémie ont installé la population dans une ignorance totale des dangers de ce virus sur sa santé.

 

A cela s'ajoute l'inexpérience voire l'incompétence de certaines administrations dénoncée dans le rapport de mission au chapitre 4.2. Les nouvelles dispositions législatives concernant le transfert des compétences entre l'Etat et les autorités locales et départementales au 1er janvier 2006 ont participé de cette cacophonie administrative et de la partie de ping-pong qui s'est jouée entre ces mêmes administrations.

 

Des collectivités locales qui ont refusé de prendre en charge la lutte anti-vectorielle au ministère de la santé resté sourd aux alertes locales concernant le manque flagrant de moyen de lutte anti-vectoriel, tous ont concouru à l'installation, à la progression puis à l'explosion de cette épidémie aujourd'hui incontrôlée et incontrôlable.

 

Les intérêts économiques et financiers du département ont également participé de ce silence médiatique. Dans une île championne de France du chômage, certains irresponsables ont préféré taire la situation sanitaire de l'île aux profit des intérêts touristiques et malgré la situation dramatique actuelle, il se trouve encore des voix criminelles pour réclamer une "maîtrise de la communication" sur l'épidémie du chikungunya comme au bon vieux temps de la dictature soviétique stalinienne.

 

 

Comment lutter contre la propagation de l'épidémie ?

 

Pour assurer sa propagation, le virus du chikungunya a besoin d'un réservoir (la source) et d'un vecteur (le moyen de propagation). Le réservoir est l'homme infecté et le vecteur est le moustique Aèdes. Contrairement à l'idée répandue, l'Aèdes est inoffensif à l'état naturel (sauf allergie aux piqûres) et il en existe partout dans le monde et en Europe (Albanie, Monténégro, Suisse, Italie et sud de la France). C'est en rencontrant un réservoir à virus que le moustique devient contaminant et propage ainsi la maladie en piquant d'autres personnes saines qui deviennent infectées et qui, si elles se font piquées en période de virémie (4 à 14 jours après la première piqûre), infecte un moustique aèdes sain et la réaction en chaîne se poursuit.
Il est donc prioritairement important de réduire (l'extermination est illusoire) la présence du moustique en supprimant les gîtes larvaires que sont toutes les sources d'eaux stagnantes (vases à fleurs, soucoupes, sceaux, gouttières, détritus en tous genres) et d'effectuer des traitements larvicides.

 

L’ensemble de la population doit participer à ces actions citoyennes et quotidiennes de destruction des gîtes larvaires en complément des actions menées par les autorités locales et nationales.

 

Pour les moustiques adultes, les moyens de prévention et de protection pour les particuliers vont de la moustiquaire imprégnée spécialement recommandée aux bébés à la machine professionnelle à capturer les moustiques (par simulation du CO2 dégagée par l'organisme humain) en passant par les serpentins, les répulsifs, les diffuseurs électriques, les crèmes, gels, huiles essentielles, etc …
Des précautions particulières dans leur utilisation doivent cependant être prises par les femmes enceintes et les bébés.
Ces moyens de protection doivent impérativement être utilisés par les personnes dites en phase de virémie, et ce pendant 6 à 8 jours. L'organisme génère ensuite ses propres anticorps et le malade, en l'état actuel des connaissances scientifiques, est immunisé et n'est plus contaminant.

 

Le département étant en état de crise sanitaire majeure, il appartient à l'Etat de mettre ces moyens de lutte et de protection gratuitement à la disposition des collectivités locales pour redistribution à l'ensemble de la population.

 

Même si la contamination entre personne est à ce jour impossible par simple contact physique et qu'un malade du chikungunya n'est jamais contagieux, il est important que les réservoirs potentiels de ce virus (malades virémiques) circulent le moins possible dans des zones où sévit l'Aèdes partout dans le monde.

 

Les ministères des transports et de la santé seraient bien avisés de prendre des mesures allant dans ce sens auprès des compagnies aériennes afin de permettre aux personnes n'ayant pas un besoin impératif de voyager d'annuler leurs séjours dans ce département ou de le reporter à une autre date ou vers une autre destination.
Leurs responsabilités ne pourront qu'être engagées en cas de pandémie en Europe méridional.

 

Avec les changements climatiques et les déplacements massifs des populations, la mondialisation ne concerne plus uniquement l'économie mais aussi les épidémies et une meilleure coopération nord-sud doit être envisagée pour lutter à la source même de ces maladies.

 

 

Qu'allons nous devenir ?

 

Ni vaccin, ni médicament ; le virus du chikungunya demeure un mystère pour les scientifiques et plus encore pour les médecins généralistes qui voient défilés à longueur de journées des patients avec des troubles et symptômes multiples, du plus bénin ("simple grippe avec une forte fièvre") au plus malin ayant déjà entraîné la mort de plusieurs personnes âgées mais aussi d'adultes en pleine forme.

 

Quel avenir pour les adultes actuellement souffrant de fortes douleurs articulaires qui disparaissent pour réapparaître au bout de quelques semaines ?

 

Quel avenir pour certains enfants nés de mères infectées qui présentent des pathologies de méningo-encéphalite dès leur naissance ?

 

Quelles autres pathologies développeront les enfants nés de mères infectées dans 2 ou 3 ans ?

 

Les réponses à ces questions ne pourront intervenir qu'après les recherches engagées par les différents organismes scientifiques nationaux et qui bénéficieront aussi aux pays émergents.

 

Si les difficultés que rencontreront les chercheurs seront les mêmes que celles rencontrées face au virus du sida, la souffrance des habitants de La Réunion ne fait que commencer.

 

La honte que la nation française toute entière aura à affronter sur cette tragédie présente ne sera pas effacée par une simple date de commémoration de ces erreurs passées dans un calendrier.

 

 

 


Jean-Hugues MAUSOLE
Fondateur de l'Initiative Citoyenne d'Intérêt Public www.chikungunya.net

 

 

Liste des documents annexés
MISE EN GARDE
Les publications jointes en annexe ont pour but d'informer le public sur la dangerosité du virus Chikungunya et non d'étayer une quelconque théorie du complot militaire ou bio-terroriste.
Demande d'autorisation de publication au WHO (OMS)
Autorisation de publication du WHO (OMS)
Liste des agents biologiques susceptibles d'être utilisés comme armes
contre les populations (OMS)

Article du New-York times du 24 septembre 1986
Contributions de l'US Army à l'étude des fièvres hémorragiques virales (P-85-86)
Rapport de mission de l'IGAS (3ème et 4ème partie)
 
 
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