Article reproduit par Nanou avec l'aimable autorisation du journal Le Quotidien | ||
Le Quotidien de la Réunion du Lundi 19 juin 2006 |
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GRIPPE AVIAIRE : FORMATION DES PROFESSIONNELS DE SANTE LIBERAUX | ||
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Dans le cadre du plan gouvernemental de prévention et de lutte contre une pandémie grippale, quelque 3.700 professionnels de santé libéraux sont concernés par des soirées d’information et de formation qui doivent démarrer prochainement à la Réunion. Si un jour la menace devient réalité, les soignants seront en effet en première ligne. |
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Même en ne considérant que son impact sur le département, le scénario catastrophe d’une pandémie de grippe fait froid dans le dos et relègue presque l’épidémie de chikungunya au rang d’une aimable perturbation sanitaire. Il est pourtant possible si surgit un jour un nouveau virus, à la fois très virulent et à forte contagiosité inter‑humaine, contre lequel la population ne serait pas ou très peu immunisée. Depuis l’apparition du virus H5N1, hautement pathogène, en 1997 dans un élevage de volailles à Hong-Kong, puis surtout sa réémergence en 2003, la crainte est en effet qu’il « s’humanise » pour se transmettre non plus seulement de l’animal à l’homme mais entre les hommes. Face à cette menace – qui n’est pas inéluctable mais « fortement probable », sans qu’on sache à quelle échéance -, les autorités sanitaires s’organisent pour protéger la population. La France a ainsi réactualisé, cette année, son plan gouvernemental de prévention et de lutte « Pandémie grippale » L’un des grands axes de ce plan est de s’appuyer sur les sur les professionnels de santé libéraux. Le nombre de personnes malades sera en effet tel que les hôpitaux, engorgés, ne pourront être réservés qu’aux cas graves. « Les médecins libéraux, renforcés en cas de besoin par d’autres professionnels de santé, assurent la première ligne d’action. Ils traitent à domicile tous les patients qui ne nécessitent pas de prise en charge médicale lourde », décrit le document gouvernemental. C’est dans ce cadre que, fin avril, le ministère de la santé a lancé un appel d’offres afin d’organiser, dans chaque région, la formation des professionnels concernés. A la Réunion, deux associations de formation médicale continue – MG-Forme et l’Aform – ont coopéré pour y répondre. Après avoir participé, le mois dernier, à un séminaire sur ce thème à Paris, le docteur Christian Bettoum, expert formateur local, s’apprête à démarrer la première étape à savoir la formation des formateurs – au nombre d’une vingtaine – qui relaieront l’action.
Entre les médecins généralistes, les
spécialistes, les médecins scolaires, de PMI et du travail, les infirmier,
les kinésithérapeutes, les dentistes, les pharmaciens, etc., le docteur
Bettoum a calculé que quelque 3.700 professionnels de santé sont
concernés. Soirées d’information Tous participeront-ils aux soirées d’information et de formation (non obligatoires) qui seront organisées « dans les onze plus grosses communes de l’île » entre le mois d’août prochain et mars 2007 ? Assurément pas. Mais le praticien saint‑paulois veut croire en leur forte mobilisation et en leur « sens moral ». « On a connu une catastrophe avec le chikungunya parce qu’on n’était pas préparé. Si aujourd’hui, alors qu’il s’agit de se préparer à une pandémie d’une toute autre ampleur et gravité, les professionnels ne sont pas motivés, ce serait bien triste », commente-t-il en substance. Outre les informations d’ordre historique, épidémiologique et virologique, les soirées prévues permettront de présenter les différents axes de réponse sanitaire, notamment les « mesures barrières » sensées limiter la diffusion du virus. Celui-ci se propage par le biais des gouttelettes de salive et des petites particules en suspension dans l’air projetées par la toux ou les éternuements. Il pénètre dans l’organisme par le nez, la bouche et les yeux. A moins de deux mètres d’une personne malade, l’exposition est considérée comme « majeure ». Une personne sera déjà contagieuse vingt-quatre heures avant l’apparition des premiers symptômes grippaux... Particulièrement exposés de par leur profession, les soignants devront être protégés au maximum, ne serait-ce que pour rester le plus possible capables de travailler, souligne le docteur Bettoum. Pour cela, aux principes d’hygiène standard, s’ajouteront diverses mesures, notamment le port d’un masque. Les malades eux‑mêmes en porteront un de type chirurgical, dès qu’ils seront au contact avec un soignant ou une autre personne à moins de deux mètres ; mais le masque des soignants sera plus élaboré : de type respiratoire, capable de filtrer des aérosols. Le docteur Bettoum fait remarquer au passage l’extrême inconfort qu’ils représenteront, en climat tropical... Un stock de 50 millions de ces masques respiratoires a déjà été constitué l’an dernier ; 70 millions supplémentaires seront disponibles d’ici la fin de l’année. Sur le plan médicamenteux, la réponse réside dans deux antiviraux (Relenza, mais surtout Tamiflu) dont les stocks (Tamiflu) atteindront environ 25 millions d’unités d’ici la fin de l’année. Quant au vaccin, il en existe déjà un, fabriqué à partir d’une souche atténuée du H5N1 ; mais rien ne dit qu’il sera efficace sur un virus variant. « Un nouveau vaccin ne sera vraisemblablement disponible qu’après une première vague pandémique ». En tout état de cause, il s’adressera à des « groupes cibles prioritaires », notamment les enfants et les personnes âgées.
Hervé SHULZ 9 à 21 millions de malades en France > Epidémie et pandémie. Se définissent toutes deux comme « une forte augmentation dans l’espace et dans le temps des cas d’une maladie ». La différence se situe dans l’étendue et la gravité du phénomène : « La pandémie s’accompagne d’un nombre important de cas graves et d’une mortalité élevée dans plusieurs pays simultanément ». > Quelles conséquences possibles ? Les autorités sanitaires estiment que l’incubation du nouveau virus durerait de un à sept jours et que sa contagiosité débuterait vingt-quatre heures avant les premiers symptômes et durerait pendant toute la période des symptômes (de cinq à dix jours). Selon les « hypothèses stratégiques » envisagées, un malade contaminerait en moyenne quinze personnes. Par la vaccination on pourrait éviter 57% des cas, 66% des hospitalisations et 72% des décès, a-t-il été calculé. Par une prophylaxie antivirale on éviterait 70% des cas, 76% des hospitalisations, 82% des décès (sous réserve d’absence de résistances ou d’effets secondaires graves). « Sans réponse sanitaire adaptée », on estime que 9 à 21 millions de personnes seraient malades en France et que 91.000 à 212.000 personnes en mourraient. > La sensibilité du virus H5N1. Le virus H5N1 est peu résistant dans le milieu extérieur, ce qui réduit les risques de contamination indirecte. Il peut néanmoins survivre quatre jours à 22 degrés, trente jours à 0 degré et quarante jours dans les fientes. > Six niveaux d’alerte. Six phases d’évolution de la pandémie ont été définies. Dans les deux premières – « période inter-pandémique » -, il n’y a pas de cas d’infection humaine. La phase 3, à laquelle on se trouve actuellement, voit l’apparition de cas d’infection humaine mais pas de transmission interhumaine ; elle marque le début de la « période d’alerte pandémique » (pré-pandémie), qui comprend aussi la phase 4 (apparition de cas groupés de transmission interhumaine, mais encore limitée et localisée) et la phase 5 (extension des cas groupés mais encore géographiquement localisée). Enfin, la phase 6 est la « période pandémique », caractérisée par une forte transmission interhumaine dans la population, avec extension géographique rapide. Pour corser le tout, « chacune des phases peut se trouver aggravée par la survenue concomitante d’autres épidémies », précise le plan gouvernemental. |
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