Article reproduit par Nanou avec l'aimable autorisation du journal Le Quotidien | ||
Le Quotidien de la Réunion du Vendredi 23 juin 2006 |
||
IMPACT SUR LA
FAUNE ET LA FLORE |
||
Détecter le chik
chez nos animaux |
||
Depuis mai dernier l’institut national de recherche agronomique effectue des prélèvements sanguins sur les animaux vivant dans notre entourage. Objectif : savoir s’ils sont porteurs ou non du virus chikungunya et s’ils peuvent le transmettre pour mieux comprendre le fonctionnement de la maladie. | ||
Ce programme de recherche, piloté par l’unité d’épidémiologie de Clermont‑Ferrand, et dirigée par le département santé animale de l’Inra, a été intitulé «Chik animaux». Principal objectif : savoir s’il existe d’autres réservoirs du virus que l’homme et mieux comprendre le fonctionnement de la maladie. Mais surtout « savoir si les animaux participent oui ou non à la transmission de la maladie», précise Lenaïg Halos, chercheur vétérinaire et coordonnatrice du programme de recherches. Pour mener à bien cette étude et toucher un maximum d’individus, l’Inra a demandé le soutien technique à deux cliniques vétérinaires de l’Est, à la société d’études ornithologique de la Réunion (Seor), et enfin au groupement régional de défense sanitaire du bétail de la Réunion (GRDSBR). « Nous avons fait des prélèvements gratuits sur la base du volontariat et plutôt sur les animaux en bonne santé et nous n’avons jamais eu de refus », explique un vétérinaire de l’Est participant au programme de recherches.
Au final, « cardinal, tisserin, moineau et
merle de Maurice » indique Thomas Ghestemme, de la Seor, ont eu droit à
des prises de sang. Idem pour les rongeurs, bovins, ovins, caprins,
porcins et équins. Premières analyses en juillet-août A noter que ces prélèvements sanguins ont été effectués sur trois communes de l’île : Saint-André, Saint-Louis et Cilaos. « L’idéal aurait été de cibler toute l’île mais nous avons été obligés de cibler des zones représentatives par manque de moyens », prévient Lenaïg Halos. L’Inra a cependant étendu les prélèvements à d’autres communes. « Nous avons travaillé en partenariat avec les personnes mobilisées pour l’opération Curachik et à chaque fois qu’elles repèrent un foyer atteint par le chikungunya, elles demandent aux gens s’ils ont des animaux et s’ils sont d’accord pour que nous puissions effectuer des prélèvements, explique la vétérinaire ». Pour compléter son étude, l’Inra souhaite effectuer des prises de sang sur d’autres animaux comme les tangues. Un appel est lancé aux chasseurs. Pour l’instant, ces prélèvements sanguins sont conservés à -80° Celsius dans un congélateur à l’hôpital de Saint-Pierre. Les analyses de ces réserves de sang commenceront au mois de juillet-août. Une partie des analyses partira pour la métropole, une autre concernant notamment la sérologie partira pour les Etats-Unis. Impossible donc pour l’instant d’affirmer la présence possible de chikungunya chez les animaux vivant dans notre entourage même si une telle probabilité est envisageable. Et pour cause « Certains primates peuvent porter des virus présents chez l’homme. Nous avons par exemple détecté le virus chez certains orangs‑outangs », affirme Lenaïg Halos. Bien sûr, les résultats de ces analyses seront à communiquer avec précaution. Car admettons qu’on détecte la présence de chikungunya chez certains animaux, cela pourrait avoir des conséquences graves. En effet, « c’est sûr que si demain on dit que quatre cochons par exemple ont contracté le virus, le marché de la viande risque de prendre un coup », remarque Jean-Marc Devroye, vétérinaire au groupement régional de défense sanitaire du bétail à la Réunion. Idem si on fait les mêmes annonces sur les chevaux, « les manèges risquent de se vider d’un seul coup ».
Cela dit, on est encore loin des résultats
d’analyses car les nouveaux partenaires de l’Inra ont jusqu’au 15 juillet
pour effectuer les prélèvements. En tout état de cause, ce programme de
recherches permettra de répondra à un certain nombre de questions –
« Est-ce que les animaux conservent le virus en eux ? Est-ce qu’ils lui
permettent de muter ? », par exemple. Il devrait s’achever fin septembre,
début octobre à moins que l’agence nationale de la recherche en décide
autrement Delphine POUDROUX
Mesurer l’impact des insecticides Parallèlement à cette étude de l’Inra, une autre étude est actuellement menée par la Diren. Elle concerne aussi les animaux et plus largement la faune et la flore locale. Cette étude a été lancée en février dernier à la demande du préfet pour mesurer l’impact sur l’environnement des insecticides utilisés pendant la démoustication. Pour cela, la Diren a mis en place un comité scientifique. «Il est composé d’ornithologue, d’entomologiste et de botaniste», précise Dominique Weinling, Chef du service protection de la nature à la Diren. Deux écotoxicologues nationaux sont également venus prêter main‑forte. Leur mission : constater les effets des produits utilisés pour lutter contre le moustique sur les être vivants.
Pour cette étude, la Diren a déterminé un
certain nombre de groupes d’individus. «Les insectes, les oiseaux, les
abeilles, les chauve‑souris, et tous les animaux qui habitent à proximité
des zones d’habitation, comme les endormis et les caméléons», énumère
Dominique Weinling. Associations et spécialistes de la Seor,
l’insectarium, l’ONF, l’Arda, et enfin de l’Avram ont été convoqués pour
cette mission. Compte-rendu le 1er juillet En fait, le principe de l’étude est simple. «Il s’agit d’effectuer par exemple des prélèvements sur les oursins ou les moules et chercher la présence ou non de pesticides dans leur organisme», précise Dominique Weinling. Le comité scientifique a également mené des expériences sur les insectes en les enfermant dans une cage au moment de la démoustication afin d’observer leur réaction après le passage de la démoustication. «Nous avons aussi demandé aux fédérations de pêcheurs de rester vigilants sur le comportement des animaux marins. Aucune mortalité n’a été constatée dans ce milieu», ajoute le chef de la protection de la nature. La Seor a mené des enquêtes dans les zones d’habitation ciblées, indique Marc Salamolard, directeur de la Seor. Un rapport devrait être rendu au préfet le 1er juillet prochain. Mais attention, «l’évaluation de l’impact environnemental des actions de démoustication est assez complexe, il faudra faire très attention aux conclusions hâtives», souligne le chef de la protection de la nature à la Diren. «Ces études déboucheront obligatoirement sur d’autres interrogations mais nous permettront de faire des préconisations pour la lutte pérenne», ajoute Dominique Weinling. Deux autres études ont été menées parallèlement. Elles concernent la qualité de l’air après le passage des agents pour la démoustication et le lézard vert de Manapany. Bien sûr, d’autres études complémentaires pourraient être menées à terme sur d’autres individus, comme les guêpes par exemple qui interpellent beaucoup de monde en ce moment par leur comportement.
D.P. |